" La pensée est un objet d’observation. Elle peut être vue, contemplée,
appréhendée, depuis l’instant de son émergence jusqu’à l’instant de sa
disparition. Cette possibilité d’appréhension signe l’existence d’un
regard situé en dehors d’elle, qui la contemple.
Ce regard, c’est la
conscience. Essayez d’attribuer des qualificatifs personnels à ce
regard et vous n’y arriverez jamais. Il n’est ni chaud, ni froid, ni
beau, ni laid, ni grand, ni petit, ni jeune, ni vieux. Et pour
tant il se sait.
Vous vous savez regard. Vous vous savez témoin de toute expérience.
Vous vous savez connaisseur de votre corps, pouvant assister, à défaut
de sa naissance, à sa mort.
Ainsi la conscience se sait. Il ne
s’agit pas là d’une connaissance analogue à celle d’un objet connu, mais
d’une connaissance intime de ce que vous êtes, de la racine de toute
pensée et émotion, de la racine de l’être, là où le « je suis » prend sa
source.
Cet espace de silence, de présence, de conscience n’est
rien d’autre que moi-même, un moi-même libre d’attribut, libre de
possession, libre de savoir, libre d’attachement, libre de sensation,
libre d’émotion, libre de pensée.
C’est ce moi-même, dont l’authenticité ne fait nul doute, qui est nommé conscience. Il n’est pas différent de vous-même.
C’est ici que vous-même et moi- même nous rejoignons, par-delà les
cultures et les différences, par-delà les opinions et les préférences.
L’humanité, dans sa totalité, s’enracine dans l’expérience de la
conscience.
C’est cette expérience qui rapproche les êtres, les fait
communiquer d’un simple regard, les fait s’aimer sans juger. Découvrir
la conscience, c’est se découvrir, c’est abandonner toute idée, c’est
lâcher toute pensée. Dans cette complète humilité, dans laquelle le moi
est absorbé dans un espace qui le dépasse, se trouve ce que je suis, ce
que je suis dans mon essence, dans votre essence, dans notre essence. "
Article paru dans le numéro 69 de la revue 3eme Millénaire
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